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La pratique des épisiotomies systématiques à Phnom Penh, Cambodge. By Clémence Schantz

23 février 2016

La pratique chirurgicale de l’épisiotomie, qui vise à agrandir l’orifice vaginal en coupant le périnée avec des ciseaux, a été documentée pour la première fois en 1741. Cette pratique a ensuite fortement augmenté dans le monde entier au cours du 20ème siècle. Pourtant, il a été démontré depuis que l’épisiotomie n’était pas efficace pour prévenir des déchirures périnéales, et qu’elle était même délétère. A partir d’une approche mixte alliant des données quantitatives et qualitatives, nous avons mené une recherche en 2013/2014 à Phnom Penh pour comprendre pourquoi certain.e.s sages-femmes ou gynécologues obstétriciens continuent à pratiquer des épisiotomies de façon systématique malgré les recommandations internationales. Nous avons mesuré l’étendue de cette pratique dans une grande maternité de Phnom Penh à partir des registres d’accouchement de l’année 2013 d’une part, et à partir d’une analyse rétrospective d’un échantillon de 365 dossiers médicaux d’autre part. Nous avons aussi réalisé 22 entretiens semi-directifs auprès de sages-femmes, gynécologues obstétriciens et accouchées. Sur les 365 femmes de l’échantillon, 345 (94.5%, CI95%: 91.7–96.6) ont eu une épisiotomie. L’analyse univariée a montré que les nullipares ont eu plus souvent une épisiotomie que les autres (OR 7.1, CI 95% 2.0–24.7). Les raisons mobilisées par les soignants étaient : la peur d’une déchirure, la croyance que les femmes asiatiques ont un périnée plus court et moins élastique que les autres, le manque de temps dans des salles de naissances surchargées, et le fait que les femmes cambodgiennes auront un vagin plus étroit et serré grâce à cette pratique. A partir de deux exemples (Viêt Nam et Hong Kong), nous montrerons que la pratique restrictive des épisiotomies peut diminuer significativement le taux d’épisiotomie sans entrainer plus de déchirures, et ceci même en Asie. Cette communication présentera aussi de façon plus large les pratiques obstétricales contemporaines à Phnom Penh, notamment le taux de césarienne qui augmente de façon inquiétante dans la capitale.

Biodata

Clémence Schantz est une sage-femme française, doctorante en sociodémographie à l’Université Paris Descartes (Ceped UMR 196: IRD – Paris Descartes). Elle mène depuis 2013 une recherche doctorale sur les pratiques obstétricales contemporaines à Phnom Penh.